La violence n'est pas innée chez l'homme. Elle s'acquiert par l'éducation et la pratique sociale.

Françoise Héritier, anthropologue, ethnologue, féministe, femme politique, scientifique (1933 – 2017)

Communiqué de presse du 4 février 2016 – Publication des recommandations du Comité des droits de l’enfants de l’ONU

Les 13 et 14 janvier derniers, la France a été auditionnée par le Comité des droits de l’enfant de l’ONU, chargé, tous les 5 ans environ, du suivi de l’application de la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) par chaque pays signataire.

Sans surprise, ce comité réitère, dans sa recommandation publiée le 4 février 2016, sa demande à la France d'interdire explicitement le châtiment corporel des enfants dans les familles, à l'école et en tout lieu accueillant des enfants. Ci-dessous le texte du communiqué que nous envoyons aux principaux médias et que nous vous invitons à faire circuler.

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Réaction de l’OVEO à la recommandation du Comité des droits de l’enfant de l’ONU appelant la France à adopter une loi d’interdiction explicite des châtiments corporels dans les familles et en tout lieu accueillant des enfants



En France, on n’a pas le droit de frapper une personne adulte, pas le droit de frapper un animal de compagnie, mais on a le droit de frapper un enfant.

Souhaitant mettre fin à cette injustice, l’OVEO – Observatoire de la violence éducative ordinaire – a été fondé en 2005 pour favoriser, développer et promouvoir le plus largement possible l’information de l’opinion publique et des responsables politiques sur la pratique et les conséquences de la violence ordinaire dite “éducative”, c’est-à-dire les diverses formes de violence utilisées quotidiennement pour éduquer les enfants.

L’OVEO demande que l’État français adopte une loi interdisant explicitement les châtiments corporels et autres traitements humiliants à l’encontre des enfants, selon les recommandations du Comité des droits de l’enfant de l’ONU.

Ce comité est chargé, tous les 5 ans environ, du suivi de l’application de la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) par chaque pays signataire. C’est dans ce cadre que la France a été auditionnée les 13 et 14 janvier 2016.

Alors que 48 pays dans le monde, dont 20 pays de l’Union européenne, ont déjà aboli les châtiments corporels, la France ne s’est toujours pas engagée dans cette voie.

Le vote d’une loi, pourtant indispensable en France, abolissant cette pratique ne constituerait cependant qu’un premier pas. Les punitions corporelles ne représentent en effet qu’une partie de la violence éducative ordinaire.

On nomme violence éducative ordinaire l’ensemble des pratiques coercitives et/ou punitives utilisées, tolérées, voire recommandées dans une société pour éduquer les enfants. Elle comprend :

  • les violences physiques : gifler, fesser, pincer, tirer les oreilles, les cheveux, bousculer, empoigner… ;
  • les violences verbales : crier, hurler, insulter un enfant ;
  • les violences psychologiques : menacer (de coups, d’abandon), priver d’amour, culpabiliser, dénigrer, humilier, mentir, interdire l’expression des émotions...

Beaucoup de parents sont amenés à user de violence éducative ordinaire pour les raisons suivantes :

  • le fait de l'avoir eux-mêmes subie, qui pousse les parents à reproduire le seul schéma éducatif qu’ils connaissent, le transmettant ainsi de génération en génération ;
  • la méconnaissance des effets de la violence éducative sur les enfants, perçue comme sans gravité et comme permettant d’“éduquer correctement” les enfants ;
  • l’interprétation erronée des comportements des enfants par méconnaissance de leurs besoins et de leur développement (avancées des neurosciences).

Les conséquences de la violence éducative ordinaire sont nombreuses :

  • à court terme : stress, sidération mentale, douleur, peur, tristesse, rancune ;
  • à moyen terme : anxiété, diminution de l’empathie, sentiment d’abandon, baisse de la confiance et de l'estime de soi ;
  • à long terme : diminution de l’intelligence et de la créativité, risques accrus de dépression, de conduites addictives, de comportements violents, d’automutilation, d’accident, difficultés relationnelles, problèmes dans la vie sociale et professionnelle.

Pour l’ensemble de ces raisons, l’éducation d’un enfant doit être affranchie de toute violence.

C’est pourquoi l’OVEO demande l’inscription, dans le Code civil, de l’interdiction explicite de toute violence faite aux enfants, y compris au sein de la famille et dans tout lieu de garde, d’enseignement et de soin.

Il est évident que chaque famille a le droit d’élever librement ses enfants avec ses propres valeurs, son histoire. L’OVEO souhaite rassurer les parents : le but n’est pas de les juger ou de les culpabiliser, car la plupart des parents pensent agir pour le bien de leurs enfants, ni de les envoyer en prison, mais, au contraire, de les accompagner dans cette mission difficile qu’est la parentalité.

C’est pourquoi nous demandons que cette loi soit assortie d’outils d’accompagnement et de sensibilisation – formation des professionnels de la petite enfance, campagnes et documents d’information, livret de parentalité, lieux d’accueil et de soutien à la parentalité, etc. – indispensables à la prise de conscience et à l’évolution des comportements.

Respecter l’intégrité des enfants, c’est leur enseigner par l’exemple et leur permettre d’éprouver dans leur corps ce qu’est le respect de l’autre. En prenant le chemin d’une éducation sans violence, c’est la société tout entière qui deviendra moins violente.


Quelques articles de presse commentant le 4 février 2016 les recommandations de l'ONU :
- Le Monde, La France, mauvaise élève des droits de l’enfant
- La Croix, Droits de l’enfant : la France mauvaise élève.
- Ouest-France, La fessée recule partout, mais pas en France.
- Un article du 5 février sur le site Madmoizelle.com reprend l'information en citant le communiqué de presse de l'OVEO : L’ONU demande à la France d’interdire les violences « éducatives ».

Voir l'intervention de la secrétaire d'Etat à la famille Laurence Rossignol à Genève sur les enregistrements vidéo de la 71ème session du Comité des droits de l'enfant (cette intervention se trouve à la fin de la 3ème vidéo de la page).

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