Quand on a rencontré la violence pendant l'enfance, c'est comme une langue maternelle qu'on nous a apprise.

Marie-France Hirigoyen.

Une bonne nouvelle pour les enfants : la France fait un pas vers l’abolition de la violence éducative ordinaire (VEO)

Le peristyle, la colonnade et le fronton du Palais Bourbon

Ce jeudi 22  décembre 2016, avec le vote définitif de l’article 68 du projet de loi « Égalité et Citoyenneté » par l’Assemblée nationale, l’article 371-1 du Code civil précise désormais que l’exercice de l’autorité parentale exclut «  tout traitement cruel, dégradant ou humiliant, y compris tout recours aux violences corporelles ». La notion de violence corporelle inclut toute punition physique impliquant l’usage de la force et visant à infliger un certain degré de douleur ou de désagrément, aussi léger soit-il, dans le but de modifier ou d’arrêter un comportement estimé incorrect ou indésirable.

Les enfants disposent désormais du même droit au respect de leur intégrité physique et psychologique que les adultes.

L’exposé des motifs de l’amendement adopté interdit également le « recours au droit de correction envers les enfants, qui est une notion jurisprudentielle utilisée pour ôter ou diminuer la responsabilité d’un adulte […] qui commet des violences ou a recours à des punitions corporelles à l’endroit d’un enfant […] » (amendement N° 42).

Les parents doivent s’abstenir de l’utilisation « de toutes les formes de violence : physiques, verbales et psychologiques » dans l’éducation de leurs enfants.

Quelques exemples de violence éducative ordinaire (VEO) :

violences verbales et psychologiques (crier, injurier, se moquer, humilier, mentir, menacer, culpabiliser, rejeter, chantage affectif…) ;

violences physiques (gifler, fesser, pincer, tirer les oreilles ou les cheveux, donner des coups de pied, secouer, saisir brutalement, bousculer, pousser, contraindre l’enfant dans une position inconfortable, le priver de nourriture…).

Les parents ont recours à la violence éducative pour plusieurs raisons :

→ l’idée, véhiculée à tort, selon laquelle ces pratiques auraient des vertus éducatives,

→ la reproduction du schéma familial et de l’éducation reçue et intégrée comme normale,

→ une méconnaissance des vrais besoins des enfants, des étapes de leur développement et des conséquences de la VEO.

Depuis 15 ans, les recherches scientifiques ont prouvé que chaque violence subie par un enfant a des conséquences néfastes sur son développement et sa santé physique et psychologique (faible estime de soi, addictions, troubles alimentaires, dépression, comportements violents…). Ces violences, intériorisées, auront plus tard des répercussions sur la société tout entière.

Nos associations, qui militent depuis de nombreuses années contre la violence éducative ordinaire, se réjouissent de l’adoption de cette loi et remercient les députés Édith Gueugneau, François-Michel Lambert et Marie-Anne Chapdelaine, qui ont porté cette loi, ainsi que François Hollande, président de la République, Laurence Rossignol, ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, et Marie Derain, conseillère Droits de l’enfant auprès du ministère, qui l’ont soutenue.

Cette loi pourra enfin nous permettre de nous attaquer aux racines de la violence, car c’est bien dans l’enfance que les coups et les humiliations nous enseignent qu’il est légitime de s’en prendre à plus faible que soi et d’utiliser la violence pour résoudre les conflits.

Dans les pays qui ont voté une telle loi et mené des campagnes d’information à l’appui, on constate une baisse de la délinquance, des suicides, de la consommation d’alcool et de drogue, de la violence faite aux femmes, des placements en foyer, des agressions. Deux générations après l’interdiction en 1979 des châtiments corporels, 87 % des Suédois n’ont jamais été frappés, et la quasi-totalité des parents n’envisagent même plus les châtiments corporels comme une méthode d’éducation possible. Depuis le vote de la loi en Suède, 50 autres pays dans le monde, dont 21 sur les 28 que compte l’Union européenne, lui ont emboîté le pas.

L’objectif de la loi est une interdiction symbolique, pour favoriser une prise de conscience et changer l’attitude des adultes envers les enfants. La règle posée est de nature exclusivement civile et ne s’accompagne d’aucune sanction.

Nous attendons maintenant que cette loi soit accompagnée de campagnes d’information et de sensibilisation de l’ensemble de la société (enfants, parents, professionnels de l’enfance et de la santé…) et de mesures d’aide et de soutien aux parents afin de privilégier un accompagnement respectueux des enfants.

Au-delà de l’abolition de toute forme de violence envers les enfants, c’est le regard porté sur eux par les adultes qui doit changer et permettre des relations plus apaisées dans toute la société.


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