C'est à l'échelle mondiale qu'il faut désormais inventer de nouveaux concepts mobilisateurs, pour parvenir à cet idéal : l'égalité en dignité et en droit de tous les êtres humains.

Françoise Héritier, anthropologue, ethnologue, féministe, femme politique, scientifique (1933 – 2017)

Les Rencontres de l’OVEO 2023 – Replay en vidéos

Le samedi 21 octobre 2023, nous avons organisé la première édition des "Rencontres de l'OVEO" sur la domination adulte et la violence éducative ordinaire.

L’évènement a eu lieu à Paris et a réuni un public venu d'un peu partout en France, engagé sur la remise en question de l'adultisme et du statut minoritaire réservé aux plus jeunes dans notre société.

Nos 16 invité·es – chercheurs et chercheuses, artistes, jeunes personnes, militant·es… – ont présenté leurs recherches ou leur témoignage sur l’éducation comme moyen de domination, l’intersection de l’adultisme avec d’autres rapports de domination, les traumatismes de l’enfance, le mépris pour la santé mentale des jeunes, l’abandon des enfants victimes de violences sexuelles et d’inceste, l’hégémonie de l’institution scolaire et sa dimension disciplinaire, et bien d’autres sujets encore.

Nous sommes fièr·es d'avoir pu faire de ces rencontres un lieu sécurisé où chacun et chacune a pu (re)trouver d’autres personnes partageant une même vision et une même dynamique, parfois dans la vulnérabilité.

Aujourd'hui, nous sommes heureux·ses de mettre à votre disposition une partie des communications présentées au cours de cette journée (retrouvez le programme de la journée ici). Ces vidéos permettent de restituer certains temps forts de cette première édition.

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Émanciper l’enfance, le livre des premières Rencontres de l’OVEO

À la suite des "Rencontres sur la violence éducative ordinaire et la domination adulte" qui se sont déroulées le 21 octobre dernier, l'OVEO et les éditions Le Hêtre Myriadis publient le recueil des textes des contributeur·ices qui y sont intervenu·es. 

Ce livre est le reflet de cette journée : des échanges de savoirs engagés, expérientiels et scientifiques. Il associe et réunit la voix de militant·es, de jeunes personnes et de chercheurs et chercheuses pour comprendre en profondeur les racines de la violence éducative ordinaire et de la domination adulte.

La sortie en librairie est prévue pour ce mois de mai, et vous pouvez d'ores et déjà le précommander sur le site des éditions Le Hêtre Myriadis

Que sont la violence éducative ordinaire et la domination adulte ? Pourquoi les enfants sont-ils massivement victimes de violences ? Quels sont les liens entre domination adulte et violence sur les enfants ? Existe-t-il un continuum entre les violences ordinaires et les violences sexuelles ou les maltraitances envers les plus jeunes ? Le statut juridique de « mineur » est-il indépassable ? Quels sont les liens entre la domination adulte sur les enfants et les autres formes de domination (masculine, de classe, économique, écologique, raciste, coloniale…) ? La relation éducative comme rapport à la fois interpersonnel et social est-elle fondée sur la domination ? Comment lutter contre la violence éducative et l'adultisme ? Quelles sont les pratiques de résistance enfantiste existantes ou à développer ?

Voici quelques-unes des questions cruciales auxquelles les contributeurs et contributrices de cet ouvrage ont tenté de répondre. Issus des communications présentées lors des Rencontres de l’OVEO d'octobre 2023, ces textes font le point sur un sujet émergent en sciences sociales, en politique et dans le grand public.

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Observations à la Cour de cassation : notre lettre ouverte

Le 18 avril dernier, la Cour d'appel de Metz a relaxé un agent de police au titre du "droit de correction". Nous publions le message que nous avons adressé à la Défenseure des droits et au Défenseur des enfants.


Madame, Monsieur,

Nous vous sollicitons dans le cadre de l’affaire d’un agent de police relaxé en appel malgré des faits de violence commis à l’encontre de ses enfants et de son ex-conjointe (Relaxe d'un policier jugé pour violences intrafamiliales : le parquet général de Metz se pourvoit en cassation ; Violences intrafamiliales : à Metz, un policier poursuivi pour avoir frappé son ex-femme et leurs deux enfants relaxé par la Cour d'appel).

Le parquet général s’étant pourvu en cassation, nous vous sollicitons au titre des prérogatives que vous détenez de l’article 33 de la loi n°2011-333 du 29 mars 2011.

Dans une précédente affaire, pour des faits de violences commis par une enseignante, vous avez en 2017 présenté des observations à la Cour de cassation, préconisant l’abandon du droit de correction coutumier (Décision du Défenseur des droits N°2017-12) :

« […] la chambre criminelle de la Cour de cassation pourrait, à l’occasion de la présente espèce, affirmer que la société actuelle ne reconnaît plus de droit de correction aux personnes ayant autorité sur un enfant, susceptible de justifier, au sens pénal du terme, des violences physiques ou morales, fussent-elles légères. »

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Les injonctions à plus de répression ne régleront pas la question de la violence

Par Jean-Pierre Thielland, membre de l'OVEO. Article d'abord publié le 20 avril 2024 sur le blog de Médiapart à la suite de l'intervention du Premier ministre sur "la violence des jeunes".


Gabriel Attal n’a pas failli à la règle, comme bon nombre d’hommes politiques, il s’empare d’une question de société réellement préoccupante pour en faire une opération de communication idéologique. Pas pour répondre sérieusement à la question de la violence, qui ne concerne d’ailleurs pas seulement les collégiens ou les adolescents, mais pour un étalage de mesures totalement tournées vers la répression. Un discours à seule visée électoraliste qui vient renforcer les idéologies autoritaires dans le contexte des élections européennes.

Si Gabriel Attal avait voulu réellement s’attaquer à la question de la violence chez les jeunes, il aurait commencé par dire : « La culture de la violence éducative, c’est fini ! »

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De l’origine radicale du mal : la preuve par Gaza ?

Nous publions ci-dessous le point de vue de deux militantes de l’OVEO qui dénoncent le génocide en cours à Gaza, qui atteint en premier lieu les plus jeunes.


Photo : Nils Huenerfuerst (Unsplash)

Par cahty malherbe et Daliborka Milovanovic

La lutte contre la violence éducative et la domination adulte ne doit pas s’arrêter aux portes de l’Occident, mais doit intégrer une préoccupation décoloniale, à savoir la question de la colonialité et sa déconstruction. L’enfantisme1 ne doit pas rester « blanc », ou « occidentalo-centré », comme le sont encore trop souvent aujourd’hui les luttes féministes.

En 2012, Olivier Maurel a proposé une formule d’une grande pertinence, pour qualifier l’aveuglement de celles et ceux qui, dans le champ des sciences humaines, réfléchissent aux causes et aux processus du phénomène violence : le trou noir2. Ce « trou noir », c’est à la fois celui de l’absence ou de la rareté des recherches sur les effets à long terme de la violence éducative ordinaire, notamment les effets sur le destin social, politique et historique des humains, et celui de la mémoire traumatique des victimes que nous avons presque toutes et tous été de ce type particulier de violence. Notamment en histoire et en sciences politiques, il ne vient presque jamais à l’idée des chercheur·euses (sauf exception 3) que les conditions de l’enfance d’un groupe de dirigeants ou d’une population donnés aient pu sérieusement déterminer le cours de leur histoire.

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  1. Construit sur le modèle de « féminisme », le terme « enfantisme » désigne les luttes en faveur des intérêts des enfants. L’enfantisme revendique une égalité de dignité et de respect entre enfants et adultes, l’abolition des rapports de domination adultiste et des conditions de vie décentes et sûres pour toutes les jeunes personnes. Il est entendu que les luttes enfantistes doivent intégrer tous les enfants et toutes les jeunes personnes (et pas seulement « nos chères têtes blondes »), quelles que soient leur nationalité, la couleur de leur peau, leur religion, leur classe sociale, leur sexe et tout autre critère discriminant.[]
  2. La Violence éducative : un trou noir dans les sciences humaines, Olivier Maurel, L’Instant présent, 2012.[]
  3. Voir La psychohistoire : de l'origine du mal.[]

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Pour une véritable culture du consentement

L’avènement d’une véritable culture du consentement ne peut faire l’économie d’une réelle éradication de la violence éducative ordinaire

Par Amandine C., membre de l'OVEO (mars 2023)

On ne peut que se réjouir de la libération de la parole des femmes qui, partout dans le monde, dénoncent en la révélant « l’épidémie mondiale » (Dr Denis Mukwege) de viols qu’elles ont subis et continuent à subir. Les législations, nationales et internationales, semblent sortir de la léthargie et de la cécité, bousculer le déni collectif. Les retours en arrière restent une menace omniprésente, mais en même temps, le flot enfin libéré des témoignages, le réveil, semblent ne pas pouvoir se tarir. Il en va de la responsabilité et de la crédibilité des autorités de ne plus faire la politique de l’autruche.

Il est à noter que la Suède, en 2018, avait été moquée pour sa nouvelle loi sur le viol exigeant un consentement mutuel explicite avant tout rapport sexuel et au cours de celui-ci : Yes means yes. Les railleries n’ont pas manqué pour tourner cela en dérision alors que le sens profond était oublié, ou en tout cas amputé de ses réelles implications. Est-ce un hasard si la Suède, premier pays à avoir aboli les châtiments corporels en 1979 et à mettre au cœur de ses politiques le respect du statut de personne de l’enfant, est aussi le premier à adopter une loi aussi pointilleuse ? Il reste intéressant que, dans ce pays où, depuis 1979, une génération entière a pu grandir dans une meilleur considération de la souveraineté du sujet, l’idée même de consentement apparaisse avec une évidence qui n’en est pas une pour la plupart des autres pays.

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Enquête de l’OVEO : 5 ans après le vote de la loi “relative à l’interdiction des violences éducatives ordinaires”, où en est-on ?

Le 10 juillet 2019 a été adoptée la loi “relative à l’interdiction des violences éducatives ordinaires”, inscrivant dans le Code civil que “l’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ou psychologiques”.

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Près de cinq ans plus tard, l’OVEO souhaite établir un bilan de cette loi, en interrogeant les professionnel·les de l’enfance et de la parentalité.

Voici le lien pour répondre à cette enquête : https://forms.gle/pUH9burgMV2oZRp88
Les réponses permettront de nourrir notre état des lieux et nos préconisations.

Nous vous remercions pour votre contribution et pour la diffusion la plus large possible dans vos réseaux professionnels !

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La violence éducative toujours dans le « trou noir » de la psychanalyse

Par Olivier Maurel

En 2010 et 2011, pour vérifier dans quelle mesure les sciences humaines tenaient compte de la violence éducative ordinaire sur les enfants, j’ai étudié tous les livres publiés en français sur la violence humaine aux environs de l’an 2000, et j’ai présenté le résultat de ce travail dans un livre : La Violence éducative : un trou noir dans les sciences humaines (L’Instant présent, 2012).

Les Figures de la cruauté. Entre civilisation et barbarie (éditions In Press)

Or, une correspondante m’a signalé un livre plus récent qui se présente aussi comme une étude globale sur un aspect de la violence : la cruauté. Ce livre s’intitule : Les Figures de la cruauté. Entre civilisation et barbarie (éditions In Press). Il s’agit en fait d’un recueil d’articles publié en mai 2016 et résultant d’un séminaire organisé sur la saison 2014-2015 par l’association Schibboleth – Actualité de Freud, et dont la quasi-totalité des participants (35 sur 40) étaient psychanalystes. Ce livre, de plus de 600 pages grand format, a été conçu dans « le cadre des activités scientifiques » de cette association. Il réunit une quarantaine d’auteurs, ce qui représente un bon corpus pour savoir si, quinze ans après l’an 2000, la psychanalyse accordait à la violence éducative ordinaire une place un peu plus importante qu’elle ne le faisait (ou plutôt qu’elle ne le faisait pas) quinze ans avant. Je me suis donc procuré ce livre et je l’ai lu de près.

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Uniforme scolaire, violence éducative et violence en milieu scolaire

Témoignage en forme de billet d’humeur reçu le 13 janvier 2023.


Récemment, le ministre de l'Éducation français (Gabriel Attal, qui a récemment été "muté" au poste de Premier ministre) a annoncé "expérimenter" l'uniforme dans plusieurs écoles du pays, et d'ores et déjà plusieurs municipalités s'y sont mises. Comme c'est parti là, la France cherche à implanter l'uniforme scolaire obligatoire, et ce au niveau national. Et ce, après avoir tenté d'implanter un service national universel obligatoire pour les adolescents (comprenez une version "lite" du service militaire), et avoir fait la chasse aux tenues connotées trop "musulmanes" dans plusieurs lycées. Tout ceci pour, selon eux, lutter contre le "communautarisme", l'extrémisme religieux et le harcèlement scolaire.

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La Force des femmes

Ce compte-rendu du livre du Dr Mukwege La Force des femmes est suivi de la lettre envoyée le 3 janvier 2015 au Dr Mukwege par Olivier Maurel, qui a attiré son attention sur les liens entre la violence éducative ordinaire, les violences sexuelles et leur utilisation comme arme de guerre. C’est après avoir reçu cette lettre que le Dr Mukwege a commencé à parler de violence éducative, comme il le fait dans ce livre. Voir aussi l’article d’Olivier Maurel Rwanda : de la violence sur les enfants au génocide (2014) et, sur le même sujet, les p. 86-87 de son livre Oui, la nature humaine est bonne ! (2009).

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